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« Ici la fac jette ces étudiants à la rue »

Dernière mise à jour : 10 déc. 2021

« Étudier est un droit pas un privilège », tel est le slogan scandé par les étudiants sans fac de Nanterre ce vendredi soir de novembre. Ce rassemblement mené par l'UNEF TACLE et rejoint par des syndicats professionnels vise à soutenir l’occupation que les sans facs mènent depuis le 27 octobre maintenant. Mais pourquoi un tel rassemblement ? La fac n'est-elle pas ouverte à toutes et tous ? Il semblerait que non.




La sélection à la fac est une réalité que connaissent un grand nombre d'étudiantes et d’étudiants de l’école jusqu’au master, la sélection opère. Tout d'abord, au lycée avec Parcoursup mis en place par le ministre de l’Éducation nationale en 2018, un dispositif de sélection discriminant les étudiantes et étudiants les moins favorisés socialement les empêchant d’accéder aux études supérieures. De nombreuses fac se sont soulevées contre ce dispositif en bloquant notamment leurs lieux d’études. La sélection existe également à l’entrée du master donc du passage entre la L3 et le M1, elle sanctionne tout redoublement et toute erreur de parcours.


Une sélection avant tout sociale


Cette sélection est profondément sociale, elle vise à restreindre la possibilité aux enfants venant de milieux socio-culturels pauvres de faire des études. Nous observons bien que le déterminisme social se met en œuvre, en sanctionnant certaines personnes tout en favorisant d'autres personnes, notamment ceux et celles disposant d’un capital économique, social, culturel et administratif fort. À contrario une personne ayant peu de ressources dans ces capitaux-là, donc étant précaires, avec également peu de ressources culturelles à disposition se verra plus souvent refuser l’entrée en licence ou en master. Ceci s’explique car dans notre société élitiste ce manque de capitaux provoquera des difficultés à l’école, collège, lycée, fac. Le capital administratif quant à lui est souvent favorisé par des enfants ayant comme parents des fonctionnaires, donc habitués à remplir des formulaires d’inscription et de faire de longues démarches administratives.


Nous voyons donc que la sélection est profondément discriminatoire sur le plan social de par sa sanction des milieux les plus précaires. Cette sélection est donc avant tout une sélection sociale.

Malheureusement elle n’est pas que sociale, elle est également profondément raciste. Nous avons bien remarqué qu’à dossier égal, les étudiants et étudiantes racisés étaient très souvent mis de côté au profit d’étudiants et étudiantes non racisés.

La sélection sociale qui s’opère pousse donc à la reproduction sociale des élites et des précaires. Cela permet aux élites de conserver leur place de dominant sur la société et force donc les précaires à rester dans le milieu précarisant duquel ils émanent, créant donc un cercle vicieux. Les personnes sélectionnées se verront offrir les meilleurs postes de cadres, bien rémunérés avec une situation stable, alors que les étudiants non sélectionnés devront enchaîner les petits boulots précarisants, instables, rendant les fins de mois difficiles. Cette sélection qui peut paraître anodine, est en fait une sélection qui peut changer des parcours de vie, nombre d’étudiants ont dû abandonner leurs études à cause de cette sélection, voyant leur idéal et leur avenir brisé. Cette sélection sociale n’est donc qu’une autre arme de la reproduction sociale s’effectuant dans notre société.



Cependant il est important de nous questionner sur qui sélectionne à la fac. La sélection s’effectue lors de commissions pédagogiques dans lesquelles siègent notamment des enseignants-chercheurs, directeurs de master ou de licence. Ce sont ces enseignants-chercheurs-là qui refusent tout bonnement l’accès au master ou en licence aux étudiants. Lorsque ces enseignants chercheurs sont de droite, le problème ne se pose pas, iel assume la sélection, lorsqu’iels se disent de « gauche » alors là tout est bon pour trouver une excuse et se réfugier derrière. De plus, lorsque ce sont des étudiants et étudiantes qui confrontent l’enseignant-chercheur à ce paradoxe entre son engagement public et la réalité des faits, cela vire à la course aux excuses en implorant que c’est la faute du ministère et non celle de l’enseignant-chercheur si l’étudiant n’est pas pris. Cette scène n’est malheureusement pas de la science-fiction, elle s'est même déroulée à Montpellier ou un syndicat étudiant, le SCUM ( Syndicat de Combat Universitaire de Montpellier ) a confronté une enseignante-chercheuse syndiquée au FSU SNESUP. L’affaire a été rapportée par des médias locaux et est même allée jusqu’au dépôt d’une plainte du syndicat étudiant, pour diffamation publique.

Ce refus des enseignants-chercheurs peut paraître anodin, cependant il existe et iels le font quasiment tous, peu importe l’opinion de l’enseignant qu’iels soient de droite comme de gauche, les enseignants sélectionnent et continuent à le faire.


Des luttes sur certaines facs


Ce début d’année universitaire a vu fleurir de nombreuses luttes à travers la France de Montpellier à Paris en passant par Lyon, de nombreux étudiants sans fac se sont mis à lutter pour essayer d’obtenir une place en master. Comme à Montpellier, où les étudiants sans fac ont était soutenu par le SCUM, ils ont lutté durant 1 mois et demi à travers différents rassemblements, rendez-vous avec la direction, perturbation de cours, pour arriver à faire inscrire 3/4 de leurs étudiants sans facs qui c’était mobilisé ( ce qui représente approximativement une vingtaine d’étudiants inscrits ).

Même si leur lutte s'est soldée par bon nombre d'inscriptions, la présidence de l’université Paul Valéry 3 avait calomnié le syndicat par des diffamations publiques dans un mail envoyé à l’ensemble des étudiants de la fac, nous confie un syndiqué du SCUM. Un communiqué du syndicat FSU SNESUP explique également que 10 membres du syndicat auraient agressé une enseignante-chercheuse directrice de master afin de faire inscrire un étudiant. Cette enseignante chercheuse appuyée par la présidence a diffusé la rumeur ce qui a donc conduit le syndicat étudiant à déposer plainte contre le FSU SNESUP ainsi que contre la présidente de l’université. Cette rumeur montre bien que les présidences de fac sont prêtes à tout pour refuser les sans facs.


L’exemple est encore plus clair à l’université de Nanterre où là les sans fac soutenu par l’UNEF TACLE ( Union nationale des étudiants de France Tendance Action Collective et Lutte Étudiante ) occupent sans discontinuer les bureaux de la présidence depuis le 27 octobre. Là-bas aussi la présidence a engagé un bras de fer qui dure toujours à l’heure où ces lignes sont écrites. Les sans facs restent mobilisés, les rassemblements de soutien se font de plus en plus souvent et une tribune a même été signée dans le journal Libération par divers acteurs de la sphère politique et syndicale appelant à soutenir les sans facs toujours enfermés dans les locaux de la présidence de Nanterre. Et pourtant la présidence de Nanterre refuse toute négociation avec les sans facs, préférant jouer le jeu du pourrissement. Leur mobilisation et leur détermination alors que les cours ont démarré depuis plusieurs mois sont exemplaires.

A Lyon les sans facs, aussi soutenu par l’UNEF TACLE, ont réussi à obtenir pour la majorité gain de cause. Ils ont réussi à être inscrit suite à une occupation des locaux et également une grève de la faim pour deux d’entre eux.


On peut donc voir que des luttes de sans fac existent à travers la France et que des syndicats étudiants luttent avec les concernés pour tenter de les faire inscrire. Mais ces luttes ne datent pas d’hier, déjà en 1986 des manifestations étudiantes éclatèrent contre la loi Devaquet qui avait pour but d’augmenter l’autonomie des universités donc permettant à ces dernières d’augmenter les frais d’inscriptions à leur guise donc de sélectionner économiquement les étudiants. Les manifestations ont fait un mort du côté des manifestants dû à la forte répression qu’a subi le mouvement mais le projet de loi a été retiré et le ministre a démissionné. Nous vous conseillons l’excellent film « Les Lascars du LEP électronique » réalisé par des lycéens de bac pro sur le mouvement contre la loi Devaquet.


On s’aperçoit donc que ces luttes ne datent pas d’hier, et que la volonté de sélectionner et de faire du tri social sur les étudiants qui entrent ou non à l’université également. La sélection n’a que des bons intérêts pour la classe dominante, en privant les étudiants d’accès aux études supérieures les précaires sont obligés de rester dans la précarité tandis que les élites peuvent se maintenir à leur place de dominant. Cette sélection n’est qu’un tri social ayant pour objectif de maintenir l’ordre établi par la reproduction sociale. Si l’objectif des classes dominantes par la reproduction sociale est de reproduire l’ordre social déjà présent, notre objectif à nous, est de le détruire en même temps que ce système étatique et capitaliste.


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